la fin de l’abondance des ressources touche tous les domaines. Celui du secteur numérique et de la data, gros consommateur d’énergie,
Aujourd’hui, la fin de l’abondance des ressources touche tous les domaines. Celui du secteur numérique et de la data, gros consommateur d’énergie, est de plus en plus discuté. Les États, ainsi que les grandes entreprises gérant le cloud commencent à modifier leurs pratiques et tentent de réguler. De quoi parle-t-on exactement ? et quelle est l’ampleur de ce phénomène si énergivore pour notre planète ?
Le numérique plus énergivore que le transport aérien
Depuis plusieurs années, des chercheurs dénoncent la pollution invisible du net. Les chiffres évoqués parlent d’eux-mêmes. D’après l’Agence de la transition écologique (ADEME), le numérique génère 3,5 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES) soit plus que le transport aérien civil (2 %).
Le Rapport du think tank Shift Project, sur l’impact environnemental du numérique (mars 2021) montrait d’ailleurs que le numérique, au cœur du fonctionnement de notre système, était incompatible avec la trajectoire fixée des 2°C. En effet avec 6% d’augmentation par an de Gaz à Effet de Serre (GES), la part du numérique dans ces émissions, pourraient doubler d’ici 2025.
A cela s’ajoute la consommation électrique nécessaire aux déploiements toujours croissants des usages. Le bilan environnemental devient désastreux.
Déjà en 2015, deux chercheurs en science de l’informatique, Jean-Marc Pierson et Laurent Lefèvre écrivaient : « Du commerce à l’énergie en passant par la finance, la santé, le transport, la culture et même la science, les données numériques représentent pour beaucoup le pétrole du XXIe siècle. Chaque jour, l’industrie du Big Data se fait plus grosse ! Mais il y a une donnée que nous avons peut-être oubliée en route : tout a un coût. Et celui du Big Data est écologique. Derrière cette informatique virtualisée, distribuée et distante, se trouvent, en effet, des infrastructures bien réelles qui ont une consommation énergétique et un impact carbone forts. N’ayons pas peur des mots : oui, le Big Data pollue. »
Et les chiffres sont là ; et de poursuivre « la consommation mondiale des centres de données représentera environ 5 % de l’électricité mondiale en 2025. Entre 2010 et 2018, pendant que l’efficacité énergétique des centres de données a été améliorée de 25 %, le nombre de serveurs a augmenté de 30 %
Prendre conscience pour un nouvel usage du numérique
Bien entendu, à notre échelle, l’implantation de datas centers ou de réseaux plus performants type 5G, nous dépasse largement. Sauf comme dans le secteur du voyage, une prise de conscience de cette consommation énergivore du numérique se dessine.
Si on prend par exemple un geste quotidien comme celui d’envoyer un mail à un collègue à quelques sièges de nous et que cet envoi est évalué en terme d’impact environnemental, le débat s’éclaire autrement.
C’est ce qu’a fait une organisation Carbon Literacy Project. Selon leurs estimations, un e-mail standard génère environ 4 g de CO2 ; avec une pièce jointe volumineuse, il produit jusqu'à 50 g de CO2. Envoyer une photo de vacances de 1 Mo à dix amis équivaut ainsi à parcourir 500 mètres en voiture. Car, même adressé à un collègue à quelques mètres de distance, votre e-mail envoie des données vers les datacenters de Google ou de Yahoo qui sont situés aux États-Unis. Il parcourt donc des milliers de kilomètres en transitant par des dizaines de routeurs, serveurs et autres ordinateurs qui consomment, eux aussi, de l'énergie pour fonctionner et qui nécessitent d'être refroidis. En prenant cette moyenne de 4 g de CO2 par e-mail, c'est donc 410 millions de tonnes de CO2 par an qui sont générés. Par comparaison, le transport aérien mondial a, quant à lui, produit 859 millions de tonnes de CO2 en 2017, d'après l'IATA. Néanmoins, ce chiffre est largement sous-estimé car il ne prend pas en compte les spams, qui représentent la moitié des messages reçus. Or, même non ouverts, ces messages indésirables produisent 0,3 g de CO2 ! Au total, 80 % des e-mails ne sont jamais ouverts.
Dans l’actualité récente, une des technologies très énergivore a été remise en cause : celle des cryptomonnaies, et notamment celles des bitcoins, qui représenteraient un tiers de la consommation électrique de toutes les infrastructures numériques au monde, soit la consommation électrique de la Finlande (Le Monde, le 7 janvier 2022).
Mi- novembre, outre le crash retentissant de l’entreprise de cryptomonnaies FTX, une autre information du secteur a fait la Une : l’'État de New York interdisait pour une durée de deux ans une partie des activités de « minage » de cryptomonnaies c’est-à-dire la création de devises virtuelles considérée comme trop gourmande en énergie. Il s'agit du premier État américain à suspendre tout ou partie de ces activités ; après la Chine, il y a plus d’un an et des appels répétés depuis avril notamment de la Commission Européenne concernant les pays européens à s’engouffrer dans cette interdiction.
De même pour la mise en place de la 5G, très énergivore, des voies se font attendre pour une évaluation de son coût énergétique.
Ces nouveaux débats sur l’impact environnemental du numérique, comme pour le secteur aérien, dépassent la simple « sobriété ». Moins consommer devient mieux consommer.
D’autant plus que pour le numérique, le paradoxe est que les progrès technologiques vont permettre d’apporter des solutions à ces impacts environnementaux.
Comme on n’arrêtera pas le transport aérien pour le train, la voiture ou la marche à pied, le numérique qui mène nos vies ne reviendra probablement pas en arrière. C’est notre usage qui se modifie au fur et à mesure que le débat apparait sur la place publique et ce sont de nouvelles solutions permises par notre monde numérique qui vont nous permettre d’en réduire l’impact environnemental.
A notre échelle, comme on éteint la lumière en sortant de son bureau, peut-on évaluer l’importance d’un mail avant de l’envoyer ? ou réfléchir à sa pratique et son métier pour mieux utiliser ses données. Le « toujours plus » dans ce domaine a surement déjà vécu.
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